Les cours psy
Découvrez et apprenez, pas à pas, les fondements de la psychologie
Cours de Psychologie
Mode ZEN

1 - Fondements et définitions

Délimitation du champ d’étude

La nature d’un champ d’étude se définit à partir de la définition de l’enseignement. Celle-ci est formée d’un radical (‘psyho’) qui précise le domaine abordé et d’une extension ou suffixe (‘logie’) qui exprime l’ambition de l’étude.

  1. Le ‘psycho’

L’étymologie du terme ‘psycho’ est ‘psyche’ qui signifie ‘âme’ en grec. Jusqu’au 16ème siècle, le ‘psycho’ représentait donc un principe divin et s’opposait au corps. Ainsi, Philippe Melanchton  (humaniste allemand, 1497-1560) le définissait comme la science de l’évocation des esprits.

Au 17ème siècle, sous l’influence de la philosophie, le ‘psycho’ se transforma en un principe représentant le ‘pensant’ et qui différenciait l’Homme des animaux.

Au 19ème siècle, la science était devenue le système d’explication légitime. On attribuait donc au  psychique ce qui relève de l’activité mentale, principalement transcrite dans des phénomènes observables, quantifiables, mesurables (dans la psychiatrie par exemple).

Ce fut en 1879 que la première expérience de psychologie expérimentale eut lieu (Wundt).

Ainsi, la psychologie sociale étudie le passage des objets concrets, observables et mesurables, aux objets non concrets. Elle analyse le substrat entre le support matériel et le résultat (le langage par exemple). On dit donc que la psychologie étudie le fonctionnement mental humain indépendamment de son substrat et de ses résultats.

  1. La ‘logie’

Trois sortes de suffixes précisent les champs d’étude.

La ‘nomie’ renvoie à la règle et aux normes. Ses champs d’étude se distinguent donc par un rapport à la convention, à la normalité et impliquent donc une prise de position.

La ‘nomie’ s’oppose à la ‘logie’ qui se traduit par une volonté d’explication universelle.
Enfin, la ‘graphie’ renvoie à l’écriture, activité de reproduction précise du langage par des signes.

Ces trois extensions permettent donc de définir trois niveaux d’appréhension du réel, quelque soit l’objet observé :

  • la ‘graphie’ qui est descriptive
  • la ‘nomie’ qui est normative
  • la ‘logie’ qui est explicative

Il existe d’ailleurs des disciplines dans lesquelles les trois extensions existent :

  • ergographie : étude de la mesure du travail musculaire par l’ergographe
  • ergonomie : étude des relations entre l’homme et ses moyens, méthodes et milieux de travail
  • ergologie : étude du travail musculaire

La ‘logie’ provient du grec ‘logia’. Portant une dimension explicative, elle implique une obligation scientifique. Ainsi, la psychologie sociale n’est pas qu’une simple description du social, elle implique une hypothèse à tester dans un cadre théorique.

  1. le ‘social’

En tant qu’adjectif décrivant le champ d’étude, le ‘social’ indique le regard particulier posé sur le domaine en question : la psychologie

Selon Rousseau, le social souligne le lien entre les individus et la société, il porte donc sur les interactions. Il existe trois formes de regard possibles sur chacun des trois types d’objets existants :

Les objets concrets :

  • observer l’objet en lui-même : chimie, minéralogie…
  • observer l’évolution de l’objet : évolutionnisme (Darwin), géologie…
  • observer les relations entre les objets : physique, dynamique…

Les objets abstraits :

  • observer l’objet en lui-même : linguistique…
  • observer l’évolution de l’objet : étymologie, histoire…
  • observer les relations entre les objets : mathématiques, logique…

Le fonctionnement mental :

  • observer l’objet en lui-même : psychologie cognitive
  • observer l’évolution de l’objet : psychologie génétique
  • observer les relations entre les objets : psychologie sociale

Ainsi, Lewin dit : « La psychologie sociale est la physique des sciences humaines ».
Elle est la science des interactions mentales et humaines.

  • Historique de la psychologie sociale
  1. Ses précurseurs français
    1. Jean Gabriel Tarde

Il est considéré comme le père fondateur de la psychologie sociale en France, il fut d’ailleurs le premier a employé cette définition. Spécialiste en droit criminel, il affirmait que le système social ne peut se comprendre qu’au travers de ce qui provient de la conscience individuelle. En cela, il s’opposa aux théories de Durkheim (fondateur de la sociologie) pour lequel les comportements s’expliquaient en fonction de la société. Sa célèbre étude du suicide tendit à démontrer qu’il s’agissait d’un acte social et non individuel.

Tarde développa deux principes fondamentaux :

  • L’imitation : chaque individu a tendance à imiter les autres
  • L’invention : mélange individuel de plusieurs imitations ou d’imitations successives

L’imitation est le principe à la base du conformisme mais également des différences, comprises comme des ‘contre-imitations’ : « une société est un groupe de personnes qui présentent entre eux beaucoup de similitudes produites par des imitations ou par des contre-imitation ».

  1. Augustin Hamon

Connu pour une série d’ouvrages relatifs à l’ ‘Etude de psychologie sociale’ écrits de 1894 à 1896, il entreprit la rédaction du premier traité de psychologie sociale mais n’eut pas le temps de l’achever. Il en conçut toutefois le plan :

  • les effets du collectif sur l’individu
  • les effets de l’individu sur la société

En 1894, il publia ‘Psychologie du militaire professionnel’ et montra les liens existants entre le fonctionnement de l’institution militaire et le fonctionnement mental des soldats. Il décrivit ainsi les impacts du milieu et de l’environnement sur l’individu, c'est-à-dire le principe mésologique.

En 1895, dans ‘Psychologie de l’anarchie socialiste’, il s’interrogea sur les mécanismes à l’œuvre dans les rassemblements tels que la foule et définit ainsi les facteurs congénitaux, c'est-à-dire existants ‘à l’intérieur’ d’un objet.

Pour Hamon, les facteurs mésologiques sont toujours négatifs alors que les facteurs congénitaux font avancer la société.

  1. Gustave Le Bon

                       
Dans ‘Psychologie des foules’ paru en 1895 ; il s’intéressa aux actes de ‘folie’ qui peuvent surgir lors des rassemblements. Selon lui, « la foule se forme d’un seul être et est soumis à la loi de l’unité mentale des foules ». Elle est donc dépendante d’un meneur, ce qui la définit comme une entité négative.

Il réalisa ainsi les premières études relevant de la dynamique des groupes en démontrant que des individus rassemblés n’agissent pas de la même façon qu’en étant isolés.

  1. Champ étudié

Dans ces différentes études, Tarde et Hamon portèrent leur attention sur le sujet, tandis que Le Bon étudia la foule comme un sujet. Ils se situèrent donc tous les trois dans le ‘psycho’. En revanche, leur extension est la ‘nomie’ car ils tentèrent de bâtir ou d’expliquer des normes. Ils furent suite aux œuvres d’auteurs tels que Zola ou Blazac qui se situaient dans la ‘graphie’ en décrivant les histoires humaines.

Tarde adopta une position de défense catégorielle vis-à-vis de la sociologie dukheimmiènne, Hamon bâtit ses travaux à partir d’une idéologie politique selon laquelle ce qui est lié au collectif est néfaste, contrairement à ce qui provient de l’individu (position contre le capitalisme). Le Bon défendit la position de classe par rapport aux mouvements révolutionnaires.

Bien que les trois auteurs s’opposent à la sociologie, celle-ci pouvait déjà être qualifiée de discipline scientifique puisque Durkheim construisit une méthode d’analyse.

  1. Naissance de la psychologie sociale aux Etats Unis
    1. 1er courant : le développement des outils d’observation des groupes

On peut citer les travaux de Moreno sur la sociométrie (développée dans un prochain cours) ou encore les études de Bavelas portant sur les réseaux de communication :

5 individus A, B,C ,D et E peuvent former 4 sortes de réseaux :

4 sortes de réseaux

Enfin, Bales construisit une grille d’observation des groupes permettant de classifier chaque intervention en fonction de sa nature. Il aboutit ainsi à 12 catégories :

Types de relations

Tonalité

Personne D

Pers A

Pers B

Pers C

Tous

 

Centrées sur la personne : socio-affectif

 

 

+

1

Soutien

 

 

 

 

2

Ambiance de groupe : détente

 

 

 

 

3

Décision : accepte

 

 

 

 

 

Centrées sur le travail

4

Suggestions : les donne

 

 

 

 

5

Evaluation : donne son avis

 

 

 

 

6

Orientation : donne des informations

 

 

 

 

 

 

-

7

Orientation : demande des informations

 

 

 

 

8

Evaluation : demande l’avis

 

 

 

 

9

Suggestions : les demande

 

 

 

 

Centrées sur la personne : socio-affectif

10

Décision : rejette

 

 

 

 

11

Ambiance : tension

 

 

 

 

12

Attaque

 

 

 

 

 

Cette lecture  permet d’émettre des hypothèses sur les caractéristiques du sujet étudié (ici D).

Elle est notamment exploitée au cours des recrutements dans lesquels les critères favorables sont des interventions positives en nombre supérieur aux interventions négatives, davantage centrées sur le travail plutôt que sur le socio-affectif, à destination de tous plutôt qu’envers une seule personne et enfin un nombre d’interventions du sujet supérieur aux autres membres du groupe. 

  1. Les échelles d’attitude (détails dans un prochain cours)

Elles sont utilisées pour mesurer l’attitude d’un sujet vis-à-vis d’un objet donné, c'est-à-dire les interactions entre un sujet et un objet. Bogardus (1925) construisit une échelle de distance sociale, Thurstone (1928) une échelle des intervalles apparaissant égaux, Likert (1932) une échelle du classement additionné et enfin Guttman (1942) une échelle d’analyse hiérarchique.

  1. Les expérimentations

Ce fut Triplett qui réalisa la première expérience de psychologie sociale. Il démontra que lorsque des pêcheurs sont seuls, le nombre de tours de moulinet réalisés est moins rapide que lorsqu’ils sont en groupe.

Ce résultat fut conceptualisé plus tard par Allport : il existe un phénomène de facilitation sociale concernant les tâches automatiques lors d’une expérience de coaction.

La construction de l’ensemble de ces outils a permis de passer de la ‘nomie’ à la ‘logie’ (dans son aspect scientifique et universel) tout en restant centré sur l’étude de l’homme. Par ces mouvements, le champ d’étude de la psychologie sociale a été réduit aux interactions de face à face et fit de la psychologie une science des interactions directes.

  1. En Europe
    1. Travaux sur les groupes

La psychanalyse aborda les phénomènes de groupe dés les années 60. Les premières hypothèses cognitives émergèrent en France, alors que l’université de Vincenne développait une analyse psycho-sociale en tentant de construire le concept d’inconscient politique en réalisant une synthèse des travaux de Freud et Marx.

  1. Les échelles d’attitude

Stoezel apporta un ensemble de méthodes des Etat Unis vers l’Europe. Il fonda l’IFOP en les transposant aux phénomènes d’opinion publique. Celle-ci était alors pensée comme la valeur d’une société, supérieure aux individus, et une idéologie du plus grand nombre par rapport à laquelle chacun se situe.

  1. Les expérimentations

Elles furent développées en Europe par Pages et Moscovici.

Leur première expérience est nommée expérience Da Gloria et portait sur les jurés des cours d’assise.

Dans le groupe témoin, il est demandé aux sujets de traiter des cas en proposant des peines pour trois individus successifs: le premier, auteur d’un vol de 500 francs, le second, d’un vol de 50 000 francs et enfin un troisième, auteur d’un vol de 5 000 000 francs.

Dans le groupe expérimental, les jurés devaient traiter un seul cas à la fois et non les trois à la suite.

Dans le groupe témoin, les peines s’aggravèrent proportionnellement à la valeur de la somme dérobée. En revanche, dans le groupe expérimental, les peines attribuées pour le vol de 500 francs et de 5 000 000 francs furent égales, alors que la peine pour le vol de 50 000 francs fut supérieure.

L’explication provient de la proximité établie entre les jurés et la victime du vol. La somme de 500 francs n’étant pas élevée, la peine le fut également. En revanche, le vol de 50 000 francs permettait aux jurés de s’identifier à la victime, ce qui les conduisit à décider d’une peine plus importante. A l’inverse, la somme de  5 000 000 francs étant inconcevable pour les jurés, la peine diminua.

Cette expérience montre que les jugements portés ne le sont pas à partir de raisonnements logiques. Elle légitime donc la nécessité de réaliser des expérimentations.

Moscovici travailla sur le phénomène de représentation sociale, c'est-à-dire sur les significations attribuées par le plus grand nombre et qui permettent aux sociétés de rester stables.

Dans ses travaux sur l’influence minoritaire, il expliqua comment des petits groupes parviennent à influencer la société. Il contribua donc à réintroduire le champ de la société comme un domaine d’étude de la psychologie sociale et permit ainsi de définir la psychologie sociale comme la science de l’interaction sociale.