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Cours de Psychologie
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3 - Emile Durkheim (1858.1917)

Emile Durkheim est un ancien élève de l’école supérieure de philosophie. Il découvrit les sciences sociales en Allemagne où il mena sa thèse de doctorat : ‘De la division du travail social’.

I - Ses thèmes de recherche

  1. Le lien social

La nature des relations existantes entre l’individu et la société fut l’un des axes majeurs des recherches menées par Durkheim. Il l’explora au travers de différents thèmes tels la solidarité. Il distingua deux sortes de solidarité :

  • la solidarité mécanique ou par similitude : on la trouve dans les sociétés traditionnelles et s’élabore sur le partage des valeurs et des activités des membres de la communauté.
  • la solidarité organique que l’on trouve dans les sociétés occidentales : les différentes fonctions et valeurs individuelles imposent des relations de complémentarité et d’interdépendance aux individus
  1. La société primitive

Durkheim cherchait à identifier le modèle de société primitive, c'est-à-dire les formes élémentaires d’organisation humaine. Il s’intéressa donc à la religion (Théorie de la religion, 1912) et insista notamment sur sa fonction de ‘communauté d’esprits’ et démontra ainsi son rôle dans la cohésion sociale.

Durkheim fut donc l’un des précurseurs du fonctionnalisme et est également considéré comme l’un des fondateurs du structuralisme pour certains.

  1. Le suicide

Durkheim fut le premier sociologue à réaliser des enquêtes sur le terrain. Son but était de montrer que le suicide est un phénomène social et pas uniquement un fait individuel complexe.

Il démontra ainsi que le taux de suicide était stable dans une société donnée et qu’il était plus fort dans certaines communautés déterminées. Il repéra également des régularités telles que le fait que les hommes se suicident davantage que les femmes (ces derniers étant moins attachés à leur famille), de même que les célibataires et les ruraux (par rapport aux citadins). Il montra également que le nombre de suicides était plus important durant l’été ainsi qu’une grande part des décès des personnes était en réalité des suicides masqués.

Enfin, il prouva que divers éléments biaisaient notre perception de cet acte, tel que notre histoire, leur description dans les romans ou la presse et enfin, le suicide d’un proche. En réalité il distingua quatre formes de suicide :

  • égoïste : l’individu se suicide car il n’est pas suffisamment intégré, il n’a pas assez de liens avec autrui
  • altruiste : le suicide est du à un excès d’intégration au sein d’une communauté (dans le cas des sectes ou encore de l’armée)
  • anomique : le suicide est du à un manque de régulation, la société ne donne plus de norme ni de cadre à l’individu
  • fataliste : il survient par un excès de régulations : la vie sociale est excessivement réglée, l’individu n’a pas suffisamment de marges de manœuvre

 

Défaut

Excès

Intégration

Suicide égoïste

Suicide altruiste

Régulation

Suicide anomique

Suicide fataliste

Durkheim nous apprend donc que le suicide est un indicateur social sensible à la nature des relations mises en place dans une société donnée : plus les facteurs de cohésion sont forts, plus le taux de suicide diminue :

"Le suicide varie en fonction inverse du degré d'intégration des groupes sociaux dont fait partie l'individu […] Quand la société est fortement intégrée, elle tient les individus sous sa dépendance, considère qu'ils sont à son service et, par conséquent, ne leur permet pas de disposer d'eux-mêmes à leur fantaisie" (Durkheim, Le suicide)

  1. Fait social et individu

Selon Durkheim, le fait social appartient à la collectivité et au groupe : un individu ne peut empêcher un fait social, alors que le fait social exerce une contrainte sur l’individu.

Le fait social est coercitif, c'est-à-dire qu’il impose une contrainte, une pression sur l’individu. On dit donc que la contrainte est consubstantielle au fait social, elle fait corps avec lui et ne peut s’en séparer.

Durkheim définit le fait social comme un ensemble de manières d’agir, de penser et de sentir, extérieur à l’individu, et qui sont douées d’un pouvoir de coercition en vertu duquel il s’impose à lui.

II - Les règles de la sociologie
  1. Objectif

Afin de permettre l’administration de la preuve en sciences humaines, des règles doivent être respectées dans l’observation, l’explication et le classement des faits sociaux. De plus, les faits doivent être décrits et non provoqués. Enfin, on passe à la généralisation (permettant donc l’élaboration de lois générales) par la répétition, les enquêtes et les observations.

  1. 1ère règle
    1. Enoncé

Les faits sociaux doivent être considérés comme des choses, c'est-à-dire des données à analyser de l’extérieur.

Une chose se connaît du dehors, c'est-à-dire en sortant de soi-même et en usant de l’expérimentation afin de conserver un regard extérieur. Une idée se connaît du dedans, grâce à l’introspection, elle doit donc être rejetée dans la mesure où elle ne peut être scientifiquement prouvée.

L’une des critiques émise à l’encontre de Durkheim était de confondre fait social et fait naturel (de la nature). C’était une erreur puisque ses règles signifiaient que le sociologue devait conserver une attitude mentale égale à celle du physicien.

Il est nécessaire de débuter l’observation avec le principe qu’on ignore tout du fait social et d’adopter une démarche inductive.

  1. 1er corolaire

Il faut écarter toutes les pré-notions, c'est-à-dire les notions dont le sens n’a pas été élaboré scientifiquement. Durkheim insiste donc sur la nécessité du doute systématique et fait ainsi référence au doute méthodique élaboré par Descartes.

  1. 2ème corolaire

L’objet de recherche se doit d’être un groupe de phénomènes définis par des caractères extérieurs communs. Par ailleurs, la recherche doit comprendre tous les phénomènes qui répondant à cette définition.

La première démarche du sociologue doit donc être de définir les choses à étudier pour savoir ce dont il est question : une théorie ne peut être contrôlée que si l’on connaît les faits dont elle doit rendre compte.

  1. 2ème règle

Un fait social est susceptible d’exercer une contrainte extérieure sur l’individu.

La contrainte consubstantielle n’est pas la caractéristique essentielle des faits sociaux, c’est le caractère extérieur qui permet de le reconnaître. La régularité statistique des données implique qu’il existe des tendances collectives extérieures à l’individu, c'est-à-dire une contrainte.

Pour l’individu, le social est une réalité qui s’impose à lui et qu’on ne peut changer : les statistiques sont donc la mesure de la contrainte.

Rappel :

Ces deux règles sont capitales car elles posent l’axiome fondamental de la sociologie scientifique. Elles rappellent que la mise en extériorité du social est la condition de possibilité d’un discours objectif sur le social.

  1. 3ème règle

Expliquer un phénomène social, c’est en chercher la cause efficiente et dégager le phénomène antécédent qui l’a produit nécessairement. La règle consiste donc à expliquer un fait social par un autre car c’est ainsi que la preuve est la mieux établie.

Aboutir à une transparence n’est jamais donné d’emblée pour l’intelligence, elle doit être conquise grâce à la comparaison et à l’expérimentation (comparaison systématique ou analyse des relations entre les variables) : la causalité efficiente est donc la condition d’existence de la sociologie scientifique.

« On a qu’un seul moyen de montrer qu’un phénomène est cause d’un autre, c’est de comparer les cas où ils sont simultanément présents ou absents et chercher si les évolutions qu’ils présentent dans ces différentes combinaisons de circonstance témoignent que l’un dépend de l’autre. »

  1. 4ème règle

C’est la conscience collective qui fait la spécificité du social.

Elle renvoie aux idées, aux valeurs et aux croyances qui sont communes à l’ensemble des individus qui forment un groupe et sans laquelle il n’existerait pas. Le groupe pense et agit tout autrement que le feraient ses membres s’ils étaient isolés. De ce fait, si on part des individus, on ne peut comprendre le groupe.

III - L’éducation chez Durkheim

  1. Kant, Mill et Spencer

Ils considèrent tous l’éducation comme quelque chose d’individuelle. Pour eux, l’éducation a pour objet le développement des attributs constitutifs individuels de l’espèce humaine pour porter chaque individu à son plus haut niveau de perfection possible.

Selon eux, il n’y a qu’une éducation qui doit convenir à tous les hommes quelque soit les conditions sociales ou historiques dont ils dépendent. Le pédagogue devait donc chercher quelle est l’action éducative qu’il doit exercer sur la nature humaine pour réaliser ses objectifs.

  1. Durkheim

Il pense que cette théorie est en contradiction avec tout ce que nous apprend l’histoire : il n’y a pas une seule explication universellement valable pour le genre humain, comme il n’y a pas de société dans lesquelles des systèmes pédagogiques ne coexistent pas et ne fonctionnent pas parallèlement.

En effet, l’éducation est une chose éminemment sociale par ses origines comme par ses fonctions, par suite, la pédagogie dépend de la sociologie plus que de toute autre science. L’éducation est le moyen par lequel une société renouvelle perpétuellement les conditions de son existence car elle consiste en une socialisation méthodique de la plus jeune génération.

L’éducation exercée par les adultes est imposée par la société, elle est donc une contrainte. La société nécessite que le travail se divise entre ses membres et donc qu’il n’y ait pas une unique éducation. Ainsi, l’Homme que l’éducation doit réaliser est l’Homme tel que la société veut qu’il soit.

Enfin, Durkheim a montré que tout type d’éducation est daté et localisé : elle varie selon les sociétés et dans le temps.

Il définit donc l’éducation comme l’action exercée sur les enfants par les parents et les maîtres, alors que la pédagogie consiste non en action, mais en théories qui sont des manières de concevoir l’éducation, et non des manières de la pratiquer.

L’éducation n’est donc que la matière de la pédagogie qui consiste dans une certaine manière de réfléchir aux choses de l’éducation.