Quand l’enfant devient le centre de tout : enjeux et conséquences

Aimer son enfant est une évidence pour la plupart des parents. Mais parfois, l’enfant occupe une place si centrale qu’il en vient à structurer l’ensemble de la vie affective et psychique du parent. Ce recentrage total, souvent perçu comme une preuve d’amour ou de dévouement, cache en réalité des mécanismes plus complexes : dérive affective, compensation de manques ou construction inconsciente destinée à éviter d’autres zones de vide, notamment dans le couple ou dans la relation à soi.
L’enfant, refuge affectif face aux manques du couple
Lorsque la relation conjugale s’essouffle ou devient insatisfaisante, il est fréquent que l’affectivité soit reportée massivement sur l’enfant. Ce phénomène, souvent inconscient, transforme l’enfant en rempart contre l’angoisse de solitude ou contre la frustration liée à un couple défaillant. Par exemple, cette mère qui, face à l’éloignement émotionnel de son conjoint, investit toute son attention et ses émotions dans la relation avec sa fille, jusqu’à occulter toute vie de couple.
Remplir le vide existentiel par la parentalité
Chez certain·es, devenir parent devient une réponse à un sentiment de vide intérieur. L’enfant est alors érigé en raison d’être, occupant chaque espace psychique disponible, non par simple amour, mais pour éviter d’affronter des questionnements personnels laissés en suspens. Ce père, par exemple, qui organise l’intégralité de ses journées autour de son fils, délaissant ses propres centres d’intérêt, illustre cette fusion où l’identité du parent se dissout dans celle de l’enfant.
La confusion entre dévouement et dépendance affective
Ce recentrage sur l’enfant est souvent valorisé socialement, sous couvert d’être un « parent investi ». Pourtant, il peut traduire une forme de dépendance affective, où le bien-être du parent dépend entièrement de la relation avec l’enfant. Cette posture crée une pression invisible, l’enfant devenant responsable du bonheur parental, comme ce garçon qui sent qu’il ne peut jamais s’éloigner sans provoquer chez sa mère un sentiment d’abandon.
Les risques pour l’individu et pour l’enfant
Faire de l’enfant le centre de tout expose à un double danger : l’effacement progressif du parent en tant qu’individu autonome, et l’enfermement de l’enfant dans un rôle trop lourd pour lui. L’enfant surinvesti peut éprouver des difficultés à développer son indépendance, pris entre culpabilité et besoin d’émancipation.
Retrouver un équilibre : redonner à chacun sa place
Il ne s’agit pas d’aimer moins son enfant, mais de répartir l’investissement affectif de manière plus équilibrée, en réhabilitant la place du couple, des relations sociales et de l’espace personnel. Accepter que l’enfant ne soit pas le garant du sens de la vie parentale permet de préserver une dynamique plus saine, tant pour l’adulte que pour l’enfant en construction.