Psychologie

Les grandes crises mettent à nu ce que le quotidien dissimule. Elles font remonter à la surface les tensions latentes, les élans de solidarité, les fractures sociales. Pandémies, attentats, guerres, catastrophes naturelles… Ces événements collectifs bouleversent les routines, déplacent les repères, et forcent la société à se confronter à elle-même. C’est dans ces moments que les valeurs dites “communes” se révèlent pour ce qu’elles sont vraiment : soit des principes vécus, soit des formules creuses.

La solidarité, un réflexe ou une illusion ?

Lors des premières semaines du confinement, les gestes de solidarité se sont multipliés : applaudissements aux fenêtres, entraide entre voisins, soutien au personnel soignant. Dans l’urgence, l’instinct collectif semblait réactivé. Mais ce sursaut a parfois masqué des inégalités accrues, des fatigues invisibles, des hiérarchies renforcées. La solidarité proclamée peut coexister avec le repli, le soupçon, l’égoïsme. Ce que la crise révèle, ce n’est pas seulement la générosité des uns, mais aussi l’oubli rapide des autres.

La peur, révélatrice de nos lignes de faille

Les attentats ou les pandémies réveillent une autre dynamique : celle de la peur, qui fragilise le lien social. Les soupçons se dirigent vers l’autre, le voisin, le différent. On cherche des responsables, on classe, on accuse. Dans ces moments, les valeurs d’égalité ou de fraternité peuvent s’effondrer sous la pression sécuritaire ou identitaire. La peur agit comme un révélateur cruel de nos limites : elle montre que le vivre-ensemble est souvent conditionnel, suspendu à la stabilité du monde.

Une unité possible, mais souvent éphémère

Il arrive que la crise rassemble. Qu’un événement tragique réactive un sentiment d’unité nationale, une émotion partagée, un besoin de se sentir ensemble. Mais cette unité est souvent fragile, émotionnelle, médiatisée. Elle s’efface dès que les intérêts reprennent le dessus, que les débats reprennent leur cours. Les valeurs communes sont alors convoquées comme des refuges symboliques, mais rarement transformées en politiques durables. Elles sont célébrées, mais peu ancrées.

Faire de la crise une occasion de redéfinition

Les crises peuvent aussi être l’occasion d’un travail collectif sur le sens de ce qui nous relie. Elles posent des questions fondamentales : qu’est-ce qu’une vie digne ? Qu’est-ce qu’un service essentiel ? Qui protège qui ? Si les valeurs communes sont fragiles, c’est peut-être qu’elles n’ont jamais été assez discutées. Plutôt que de chercher l’unité dans l’urgence, il s’agirait de construire une mémoire partagée de la crise, d’oser des débats profonds, de fabriquer du commun autrement. Ce n’est pas la crise qui détruit les valeurs. C’est le silence qui suit.

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