Psychologie

Colères impressionnantes, refus systématiques, crises de larmes, agitation soudaine… Les comportements excessifs chez le jeune enfant inquiètent souvent les parents, déroutent les éducateurs, et sont parfois perçus comme des troubles. Pourtant, du point de vue psychanalytique, ces excès ne sont ni des caprices, ni des pathologies : ce sont des manifestations du conflit psychique en construction. La petite enfance est une période où l’enfant, encore en plein processus de structuration du moi, utilise son corps, ses cris, et ses gestes pour exprimer ce qu’il ne peut pas encore symboliser avec des mots.

Quand le corps devient langage

Avant que le langage ne soit pleinement constitué, le jeune enfant s’exprime par le corps. Un comportement qui semble « exagéré » est souvent la traduction d’un affect débordant : peur de la séparation, frustration, excitation, jalousie, besoin de reconnaissance. Ces émotions, encore mal différenciées, s’accumulent, et trouvent un exutoire dans des gestes soudains ou des réactions intenses. Pour la psychanalyse, ces comportements sont des messages inconscients, adressés à l’Autre (souvent les parents), dans une tentative de se faire entendre, contenir ou reconnaître.

Le rôle du manque, de la frustration et du désir

L’enfant se construit dans la rencontre avec le manque : apprendre que tout n’est pas immédiatement accessible, que l’Autre est parfois absent, que le désir n’est pas tout-puissant. Ces apprentissages sont nécessaires, mais ils génèrent des tensions. Un comportement excessif peut ainsi marquer une difficulté à tolérer la frustration, ou un conflit entre le désir de dépendance et celui d’autonomie. Ces réactions peuvent aussi s’inscrire dans un moment de réorganisation psychique, par exemple autour de la marche, du langage, de la naissance d’un frère ou d’une sœur.

Une manière de chercher des limites et un contenant

Les excès de comportement ne sont pas toujours une transgression des règles, mais parfois un appel à la limite. L’enfant teste l’Autre : « jusqu’où puis-je aller ? suis-je contenu ? suis-je important pour toi ? » L’agitation, l’opposition ou la provocation sont autant de tentatives — inconscientes — de s’assurer que l’Autre est là, stable, capable de poser des limites claires et contenantes. Le cadre sécurisant n’entrave pas l’enfant : il le rassure en structurant son monde intérieur, souvent encore mouvant et anxiogène.

Des répétitions qui parlent de l’histoire familiale

Certains comportements excessifs peuvent aussi faire écho à l’inconscient parental. L’enfant est sensible aux angoisses, aux attentes, aux non-dits de son environnement. Il peut, sans le savoir, incarner une tension familiale, exprimer par ses gestes ce que personne n’ose dire. Le symptôme de l’enfant devient alors un porte-parole : il « parle » pour plusieurs, dans une logique transférentielle. C’est pourquoi la psychanalyse insiste sur le travail avec les parents, autant que sur l’enfant lui-même, pour entendre ce que cette expression cherche à signifier.

Accueillir l’excès comme une étape du développement psychique

Face aux comportements excessifs, l’enjeu n’est pas de les supprimer rapidement, mais de les accueillir comme des formes de communication. Le regard psychanalytique invite à chercher le sens plutôt que la sanction, à soutenir l’enfant dans son élaboration subjective, et à proposer des réponses ajustées plutôt que des réponses automatiques. L’excès n’est pas un dysfonctionnement, mais un moment de passage, une tentative de symbolisation inachevée, qui appelle la parole, l’écoute, la présence. C’est dans cette rencontre que le symptôme peut se transformer.

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