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La montée du désir : des mots et des caresses
Le désir sexuel est sensible. Tel mot, tel mouvement embrase notre désir, tel autre le réduit à néant. Dans la rencontre amoureuse, la montée du désir n'est pas linéaire. Elle suit des circonvolutions, des retours en arrière, de brusques avancées. Dans ce cheminement de l'envie, les mots et les gestes rivalisent d'audace et s'articulent pour attiser le désir.
L'impénétrabilité du désir
Bien que tout concoure à nous faire croire que le désir et le plaisir sont liés au geste, à l'acte, nous connaissons tous l'émoi soudain qui jaillit d'une phrase anodine, d'un geste simple, d'un coup d'œil. Au détour d'un couloir, au bureau, dans la plus quotidienne des nos activités, nous sommes saisis soudainement par le désir. Parfois, il peine à se définir, à se préciser, mais il est bien là. Ainsi que Phèdre (1), nous pensons en notre for intérieur : "C'est Vénus toute entière à sa proie attachée ". Nous avons conscience immédiatement que le désir nous surpasse, que sa survenue n'est pas maîtrisable, que l'on ne peut qu'assister à son irrémédiable montée. A d'autres moments nous savons aussi que le moindre élément peut le perturber jusqu'à le faire disparaître. Avec le désir, tout est question de synchronie. Quand entrent en résonnances nos désirs inconscients, nos pulsions, nous nous enflammons.
Les mots
Bien souvent, tout commence par le mot. Anodin, il résonne à notre oreille et nous fait sentir le désir que l'autre y place. Au détour d'une conversation, il se glisse et vient attiser notre envie de connaître l'autre. Les mots nous font circonscrire l'autre, nous permettent de l'appréhender. Par eux, nous sécurisons le lien que nous pourrions construire. Les discussions - jusque sur l'oreiller - nous permettent de vérifier que l'autre va combler notre désir, qu'il ou elle est ce que nous attendons. Finalement, par le langage, nous posons le cadre de la relation qui va se jouer. En matière de sexualité, nous essayons de déterminer à l'avance quelle compatibilité, quelle entente sexuelle peut surgir entre nous et nos partenaires.
Les caresses
Vient ensuite l'instant qui se passe de mots. Tous, nous expérimenterons ou avons expérimenté le frôlement qui place le désir sur une autre sphère. La caresse qui brutalement lui fait passer un cap et nous donne envie de l'autre, de le découvrir entièrement, de nous étourdir dans ses bras. La caresse en créant un pont entre les corps prolonge l'échange verbal. Elle permet de prendre contact et de confirmer ce que les mots avaient initié. Par des caresses, nous pouvons corporellement déterminer la disponibilité de l'autre. Telle ou telle zone stimulée communique nos envies et nous fait percevoir l'attente de l'autre. Les caresses sont le langage des corps. Elles devraient toujours accompagner l'acte sexuel dont elles affirment le caractère d'échange et de partage.
Un supplément de plaisir
Mots et caresses en ouvrant le dialogue entre les partenaires les autorisent à aller de plus en plus loin dans leur découverte réciproque. Pendant l'acte sexuel, tel petit mot prononcé à l'oreille de l'autre ou tel caresse renforcent le plaisir pris. Ils ajoutent à la mécanique amoureuse un supplément d'affect. Ils permettent aussi de tester dans quel état d'esprit l'autre se trouve et de lui communiquer ce que nous ressentons à son égard. Après l'amour, un mot doux ou un enlacement sont des signes que l'échange a eu lieu et que l'autre est l'unique dans lequel nous nous projetons. Au fond, dans l'échange amoureux toute personne a besoin d'être rassuré sur le fantasme que ce qui se produit ne peut avoir lieu qu'avec lui ou elle. C'est ce qu'apportent caresses et langages puisqu'ils permettent aux individualités de se répondre et de se refléter.
(1) Phèdre, Racine, Paris, 1676.