Psychologie

Les blessures physiques à répétition ne sont pas toujours dues à la malchance ou à une mauvaise préparation. Lorsqu’un sportif, amateur ou confirmé, accumule les arrêts forcés, les douleurs chroniques ou les microtraumatismes, il est souvent tenté de chercher des explications mécaniques. Mais il arrive que le corps signale autre chose. Derrière certaines blessures récurrentes, une part inconsciente semble œuvrer en silence, comme si le corps sabordait volontairement les efforts de la tête. Cette tension intérieure révèle parfois un conflit plus profond : celui entre un idéal contraignant et un désir de rupture, de pause, ou même de retrait.

Le corps comme langage quand la parole est empêchée

Le symptôme corporel peut être une forme d’expression là où aucun mot n’a pu être formulé. Se blesser de manière répétée peut traduire un refus inconscient d’obéir à une volonté tyrannique. Quand la tête impose une discipline rigide, des objectifs élevés ou une obligation de performance, le corps peut résister en se mettant hors jeu. Il devient alors l’ultime refuge de l’individu, celui qui dit stop quand tout le reste pousse à continuer. La blessure, loin d’être un accident isolé, devient un message crypté qu’il faut apprendre à entendre.

Exemple concret : un acharnement qui ne laisse aucune place au doute

Caroline, 41 ans, a repris la course à pied après une séparation difficile. Très vite, elle s’impose des sorties quotidiennes, double les séances, suit un plan d’entraînement sans repos. Au bout de quelques mois, une douleur au genou la contraint à s’arrêter. Elle reprend dès que possible, se blesse à nouveau. Trois rechutes en un an. En thérapie, elle dit : « Si je ne cours pas, je m’écroule. » Le sport, chez elle, n’est pas un loisir, mais un pilier rigide qu’elle ne peut questionner sans effondrement. Le corps, par la blessure, lui impose ce qu’elle refuse psychiquement : le droit de ne pas tenir, de ne pas maîtriser, de ne pas toujours avancer.

Le mythe du mental plus fort que le corps comme impasse

Dans l’imaginaire sportif, le mental est roi. Il faut « dépasser la douleur », « ne rien lâcher », « aller au bout ». Ces injonctions, valorisées socialement, négligent la fonction protectrice du symptôme corporel quand l’équilibre intérieur est menacé. La tête exige, mais le corps sent que quelque chose ne suit pas. Il devient saboteur, non pas par faiblesse, mais pour empêcher une logique destructrice de se poursuivre. Dans ce renversement, il est le gardien de ce qui reste vivant, même si cela passe par l’immobilité et la frustration.

Apprendre à écouter la blessure autrement que comme un échec

Sortir de ce cycle suppose de ne plus voir la blessure comme un ennemi, mais comme un signal. Cela nécessite de renoncer à l’idéal du contrôle absolu, et d’accepter que l’inconscient puisse avoir son mot à dire dans la pratique sportive. La pause imposée peut alors devenir un espace de transformation, non plus une punition mais un moment de vérité. Le sportif ne devient pas plus faible en ralentissant : il devient plus capable d’habiter son propre corps, avec ses limites, ses résistances et sa mémoire.

Trouver un psy