Psychologie

Recourir à un don de gamètes permet à de nombreuses personnes de concrétiser un désir d’enfant. Mais une fois la parentalité installée, se pose la question délicate de la révélation : faut-il dire à l’enfant qu’il est issu d’un don ? Derrière cette interrogation apparemment simple se cachent des enjeux psychiques profonds. Le silence autour de l’origine génétique n’est jamais neutre ; il s’inscrit dans une dynamique inconsciente où se mêlent protection, culpabilité et peur de l’altérité. Ce secret, souvent motivé par l’angoisse de fragiliser le lien parental, devient parfois un poids invisible, transmis malgré soi à l’enfant.

Le secret comme tentative de protection… et d’effacement symbolique

Clara, 38 ans, repousse sans cesse le moment d’évoquer le don de sperme avec sa fille. Garder le silence apparaît souvent comme une manière d’éviter de réactiver une blessure narcissique : celle de ne pas avoir « pleinement » conçu son enfant. Ce secret ne protège pas tant l’enfant qu’il préserve les parents de leur propre difficulté à accepter la présence d’un tiers invisible dans la filiation. En taisant l’origine, il s’agit inconsciemment d’effacer cette altérité, de maintenir l’illusion d’une parentalité « classique », débarrassée des traces de la technique ou du don.

L’impact inconscient du non-dit sur l’enfant : un flou identitaire

Même sans mots, l’enfant perçoit que quelque chose échappe à l’histoire qu’on lui raconte. Sophie, 12 ans, ressent un « décalage » dans sa place familiale, sans pouvoir en identifier l’origine. Ce flou alimente des questions sourdes : « Suis-je comme les autres ? », « Pourquoi ce malaise que je ne comprends pas ? ». Le non-dit agit comme une zone d’ombre dans la construction identitaire, où l’enfant peut développer un sentiment d’étrangeté à lui-même, non pas à cause du don, mais à cause du secret qui l’entoure.

La peur de dire : entre angoisse de rejet et fantasme de fragilisation du lien

Derrière le silence parental, se cache souvent la crainte que la révélation abîme la relation : peur que l’enfant se sente trahi, qu’il rejette ses parents ou qu’il idéalise le donneur ou la donneuse. Ces peurs traduisent des conflits inconscients autour de la légitimité parentale, où l’on confond filiation biologique et lien affectif. Pourtant, c’est le secret lui-même qui, à long terme, fragilise la confiance.

Dire pour inscrire l’enfant dans une histoire claire et vivante

Parler du don n’est pas un aveu, mais une manière d’offrir à l’enfant une continuité dans son histoire, sans rupture brutale ni mystère pesant. Il ne s’agit pas de tout révéler d’un bloc, mais d’instaurer une parole progressive, adaptée à l’âge et à la sensibilité de l’enfant. Ce travail de vérité n’est pas seulement destiné à l’enfant ; il permet aussi aux parents de pacifier leur propre rapport à l’altérité dans la filiation. En nommant l’origine, on transforme un secret lourd en un fait assumé, laissant à l’enfant la liberté de s’approprier son histoire sans honte ni idéalisation.

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