Agitation intérieure et besoin de tout faire : une fuite qui ne dit pas son nom

Il y a des vies menées tambour battant, où chaque minute est occupée, chaque journée optimisée. Tout semble en mouvement, fluide, efficace. Mais sous cette surface dynamique, une tension persiste, comme si le silence ou l’inactivité devenaient insupportables. Derrière ce besoin de tout faire, de ne jamais s’arrêter, se cache parfois une douleur moins visible : celle qu’on préfère fuir plutôt que sentir. L’hyperactivité, loin d’être un simple trait de caractère ou une habitude moderne, peut devenir un refuge agité contre une angoisse plus profonde.
Remplir pour ne pas ressentir
L’enchaînement constant des tâches, des projets, des sorties n’est pas toujours motivé par le plaisir ou le sens. Il peut traduire une peur archaïque du vide, du face-à-face avec soi-même. Dans ces moments-là, faire devient une protection. S’arrêter, c’est risquer que quelque chose remonte. Alors on remplit, on anticipe, on accélère. L’agitation devient une armure, un moyen de rester à distance de ce qui, au fond, nous trouble. Ce mécanisme de fuite est souvent inconscient, appris très tôt pour échapper à une souffrance psychique non symbolisée.
L’illusion de maîtrise
Être partout à la fois donne une impression de contrôle. Mais plus le mouvement s’intensifie, plus il trahit un besoin urgent de se détourner d’un point sensible. Cette course, qu’elle prenne la forme du travail, du sport ou d’un surinvestissement relationnel, est parfois une défense contre une perte de repères ou une vieille blessure. Loin d’apporter un véritable apaisement, elle finit par épuiser. Et l’on se retrouve, malgré l’action, à ressentir un flottement intérieur, une agitation qui ne mène nulle part.
L’entourage séduit, puis déconcerté
De l’extérieur, ces personnalités sont admirées : actives, engagées, toujours disponibles. Mais cette façade d’efficacité cache souvent un désarroi plus profond. Les proches peuvent ne pas comprendre pourquoi, malgré la réussite apparente, un malaise persiste. Certains finissent par ressentir une distance, une forme d’indisponibilité émotionnelle derrière l’agitation. Et la personne concernée, elle, ne sait pas comment ralentir sans s’effondrer. Car le mouvement n’est pas un choix, mais une condition de survie symbolique.
Un exemple : Julie, 29 ans, toujours en mouvement
Julie, 29 ans, travaille dans l’événementiel. Sport, bénévolat, voyages, sorties : elle ne s’arrête jamais. Au fond, elle sent pourtant un vide, une fatigue sourde. En thérapie, elle évoque un passé où l’immobilité signifiait l’abandon : enfant, elle se tenait occupée pour ne pas ressentir l’absence d’un père distant. Sa vie actuelle rejoue ce schéma : agir pour ne pas sentir. En ralentissant progressivement, Julie commence à accueillir l’émotion laissée en suspens. Ce n’est qu’en acceptant de ne plus fuir qu’elle retrouve un peu de paix.