Psychologie

Certaines personnes arrivent en thérapie avec une attente forte, intense, souvent implicite : que le psy les répare. Non pas qu’il accompagne ou éclaire, mais qu’il agisse, qu’il soigne, qu’il redresse ce qui a été brisé. Derrière cette attente, il y a souvent un fantasme ancien de toute-puissance extérieure, projetée sur le thérapeute comme dernier recours. Ce n’est pas une erreur, ni une faiblesse : c’est un appel issu de l’enfance, une forme d’espoir intransigeant que le cadre thérapeutique permet justement de déconstruire en douceur.

Une projection sur le psy sauveur

Quand la souffrance est trop grande ou trop ancienne, l’idée de devoir encore agir, parler, penser peut sembler insupportable. Le thérapeute est alors investi d’un rôle démesuré, celui d’un réparateur providentiel. Le danger n’est pas tant l’attente elle-même, mais le fait qu’elle reste inconsciente, donc déçue à chaque séance. Le moindre silence, la moindre non-réponse peut alors être vécue comme un abandon ou une incompétence, alors qu’il ne s’agit que du refus d’endosser un rôle qui, justement, entraverait le processus.

Quand l’attente bloque le travail

Plus l’on attend que l’autre fasse, plus on s’empêche de s’impliquer dans son propre mouvement intérieur. Cette posture de passivité peut paraître protectrice, mais elle finit par créer un blocage. Le psy devient un objet d’attente, non un partenaire de cheminement. Dans ces cas-là, la frustration est souvent à la hauteur de l’idéalisation : immense. Ce n’est qu’en verbalisant cette attente de toute-puissance, en en faisant un objet de réflexion, qu’il devient possible de reprendre une place active dans le travail thérapeutique.

L’exemple de Karim, 38 ans

Karim arrive en thérapie après un burn-out. Il veut comprendre, mais surtout « que ça passe ». Il répète souvent qu’il « ne veut pas perdre de temps », qu’il espère que « le psy saura comment s’y prendre ». Mais dès qu’il sent que rien ne s’apaise rapidement, il s’agace, se tait ou ironise. Progressivement, il met en mots cette colère sourde : celle d’avoir toujours dû se débrouiller seul. Pour la première fois, il s’autorise à formuler ce désir d’être pris en charge, contenu, sans conditions. Ce mouvement transforme la thérapie : non plus attente de solution, mais exploration d’un manque.

Déconstruire sans trahir

Reconnaître qu’on espérait être réparé n’est pas honteux. C’est même une étape essentielle. Le travail thérapeutique consiste aussi à faire place à ces illusions nécessaires, pour les traverser sans les écraser. Le psy ne soigne pas comme un médecin réparerait une fracture. Il accompagne le sujet dans un processus où ce dernier devient peu à peu acteur de sa propre recomposition. Abandonner l’attente d’un sauveur, ce n’est pas renoncer à être aidé. C’est accepter que l’aide soit un lien, pas une action magique.

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