Psychologie

On le pousse, on le contrôle, on le prive, on le surcharge. Le corps devient parfois un champ d’expérimentation anxieuse, de compensation silencieuse, voire de maltraitance douce. Les addictions corporelles – nourriture, sport, sexualité, dopage, automutilation parfois – ne parlent pas seulement du plaisir ou de la performance ; elles parlent d’un lien blessé à soi. Et si ces gestes, ces excès, ces excès de rigueur étaient une tentative de dire ce qui ne peut pas encore se penser ?

Le corps comme refuge de l’indicible

Quand la parole ne suffit pas, le corps prend le relais. Il devient le lieu où s’inscrivent les conflits intérieurs, les blessures anciennes, les tensions psychiques non symbolisées. Le comportement addictif corporel est souvent une mise en scène silencieuse d’un mal-être profond. Ce que le sujet ne peut pas encore dire, le corps le porte – parfois jusqu’à l’épuisement.

Manger, bouger, jouir… ou disparaître

Les addictions liées au corps ont ceci de particulier qu’elles brouillent la frontière entre soin de soi et destruction. Ce sont des gestes du vivant, mais poussés à l’excès ; des besoins fondamentaux, déformés en obsessions. Le corps n’est plus vécu comme un lieu habité, mais comme un objet à maîtriser ou à faire taire. Qu’il s’agisse de boulimie, d’hyperactivité ou de conduites sexuelles compulsives, l’enjeu n’est pas seulement comportemental : il est symbolique.

Derrière la maîtrise, la peur du chaos

Ce qu’on impose au corps traduit souvent une lutte pour ne pas sombrer. Pousser ses limites, brûler ses réserves, se contraindre à l’extrême… Ces excès disent une peur d’être envahi par quelque chose de plus grand, de plus flou : une angoisse, un souvenir, une douleur enfouie. La dépendance corporelle agit comme une tentative d’auto-régulation face à un monde intérieur débordant.

La trace d’une séparation incomplète

Le lien au corps dans ces addictions est souvent marqué par une histoire de séparation, de non-accueil, de confusion entre le besoin et le danger. Le corps devient alors à la fois lieu de survie et de conflit, de recherche d’existence et d’attaque de soi. Ce n’est pas le corps que l’on hait, mais la partie de soi qui souffre sans avoir été entendue. Et c’est cette souffrance muette qui se rejoue dans les excès.

Vers une réconciliation possible

Sortir de ces comportements ne consiste pas à « reprendre le contrôle », mais à réhabiliter le lien au corps. Le ressentir, l’écouter, l’habiter à nouveau comme une part vivante de soi. Cela demande parfois un travail psychique profond, une mise en mots lente de ce que le corps exprimait à sa manière. Le chemin ne passe pas par la discipline, mais par la reconnaissance. Celle d’un corps qui n’était pas le problème, mais le messager.

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