Psychologie

Assurance maladie, chômage, retraite, aides sociales : l’État-providence organise la protection face aux risques de la vie. Il incarne une promesse d’égalité et de sécurité, mais cette promesse n’est pas sans ambiguïté. Car si l’État prend soin, il prend aussi en charge, parfois jusqu’à occuper une place parentale. Et cette proximité protectrice peut, dans certains cas, générer une dépendance invisible.

Une figure sécurisante dans un monde incertain

Dans une société où les repères traditionnels s’effacent, l’État-providence offre une continuité, une garantie, une forme de lien symbolique. Il permet de traverser les fragilités sans être broyé, de s’appuyer sur une structure quand tout chancelle. Cette fonction de filet social va bien au-delà du soutien économique : elle rassure psychiquement. On sait que, quoi qu’il arrive, « quelqu’un » veille, prend le relais, indemnise, compense. Ce sentiment d’être protégé structure la confiance collective, voire une forme d’appartenance.

Quand la protection devient soumission douce

Mais cette sécurité a un revers. À force de tout organiser, de tout cadrer, l’État-providence peut occuper une place si centrale qu’il en réduit l’autonomie subjective. L’individu devient ayant droit avant d’être acteur. Il attend, réclame, vérifie ce à quoi il peut prétendre. Le citoyen se transforme en administré. Cette posture peut produire une passivité sociale, voire une forme d’attente silencieuse face aux institutions. On se plaint de l’État tout en lui déléguant le soin d’agir pour nous. Le risque, ici, est celui d’une régression collective vers un modèle enfantin : celui d’un « parent » protecteur, mais étouffant.

Une tension entre soutien et émancipation

L’un des enjeux les plus subtils de l’État-providence est de trouver l’équilibre entre assistance et responsabilisation. Comment aider sans déposséder ? Comment protéger sans empêcher de se tenir debout ? Cette tension traverse les discours politiques, mais aussi les ressentis individuels. Certains se sentent soulagés par la protection publique, d’autres y voient une camisole douce. Entre les deux, une interrogation : à quel moment l’aide reçue cesse-t-elle d’être un appui et devient-elle un empêchement à agir par soi-même ?

Repenser la relation à l’institution

Plutôt que d’opposer l’autonomie à la protection, il s’agirait peut-être de refonder un rapport adulte à l’État : lucide, actif, mais toujours soutenant. L’État-providence n’est pas une figure parentale à adorer ou à haïr. Il est un outil politique, un espace collectif à penser, ajuster, critiquer. Sortir de la dépendance, c’est aussi reconnaître sa place de sujet dans ce système. Ne pas seulement attendre, mais participer. Ne pas tout déléguer, mais co-construire. C’est là que la protection devient une puissance d’émancipation.

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