Être seul·e sans se fuir, éloge de la rencontre avec soi

On dit souvent que la solitude permet de se retrouver. Mais encore faut-il pouvoir s’y rencontrer vraiment. Car être seul·e physiquement n’implique pas forcément une présence à soi. On peut vivre des journées sans contact, tout en étant absorbé·e par l’extérieur : écrans, bruit mental, fuite dans l’imaginaire, agitation constante. La vraie solitude commence là où l’on cesse de se fuir soi-même.
La tentation de l’évitement
Face au vide laissé par l’absence de l’autre, il est fréquent de chercher des moyens de remplissage : emploi du temps saturé, distraction continue, projets en série. Ces stratégies ne sont pas inutiles en soi, mais elles peuvent masquer une difficulté plus profonde : celle d’être au contact de soi sans médiation. Fuir la solitude, c’est parfois fuir ce qui, en nous, demande à être entendu.
Ce que le silence fait remonter
Quand on ne détourne plus le regard, quelque chose se met à émerger : souvenirs, manques, colères étouffées, tristesses passées. Ce ne sont pas des obstacles à la solitude, mais ses premiers contenus. Se retrouver face à soi, c’est accepter de traverser ce qui remonte, sans chercher à le censurer. C’est dans cet espace nu que commence la vraie rencontre intérieure.
La peur de ne rien trouver
Il existe aussi une peur plus subtile : celle du vide existentiel. Et si, seul·e, il ne restait rien ? Pas d’élan, pas de désir, pas de forme claire. Ce vertige n’est pas rare. Il parle d’un manque d’habitude à être en lien avec soi autrement qu’en réaction à l’autre. Mais ce vide apparent n’est pas un néant : c’est un champ à explorer, lentement, sans but.
De la fuite à l’apprivoisement
Être seul·e sans se fuir, c’est moins une performance qu’un apprivoisement. Cela suppose de ralentir, d’écouter ce qui vient, sans chercher à s’en extraire. Cela demande parfois du courage, mais aussi de la douceur. Car ce que l’on rencontre en soi dans la solitude n’est pas toujours confortable, mais c’est souvent juste.
Une présence à soi qui ne dépend plus du lien
En apprenant à rester avec soi, on cesse peu à peu d’attendre que l’autre nous ramène à la vie. Cela ne veut pas dire renoncer au lien, mais ne plus en faire la seule source d’oxygène. Être seul·e sans se fuir, c’est ouvrir un espace où l’on peut respirer, exister, sentir, sans avoir besoin d’être regardé·e pour se sentir vivant·e. C’est peut-être là que commence la liberté intérieure.