Je sens qu’il faut que je change, mais je ne sais pas comment

Il y a des moments où l’on sent, de façon floue mais insistante, qu’on ne peut plus continuer comme avant. Ce n’est pas un drame, pas un effondrement, mais une sorte d’évidence intérieure qui commence à se faire entendre. On sent qu’un cycle se termine, que quelque chose en soi appelle un déplacement, une bifurcation, un autre rapport au monde. Mais ce mouvement naissant n’a pas encore de forme, pas encore de mots, et cela peut créer un inconfort profond. On se retrouve dans un entre-deux étrange : plus vraiment bien là où l’on est, mais sans savoir vers où aller, ni comment s’y rendre. Le quotidien devient fade ou lourd, les projets n’enthousiasment plus, les anciennes réponses ne suffisent plus. Et cette absence de direction rend le besoin de changement encore plus difficile à vivre.
Un élan sans carte
Ce genre d’appel intérieur ne ressemble pas à une décision rationnelle. Il ne répond pas à un plan, ni à une stratégie de réussite. Il s’impose comme une sensation : il faut que ça bouge, que ça change, que quelque chose en moi respire autrement. Mais quand le désir de transformation émerge sans direction claire, il peut vite être ravalé par la peur ou le doute. On se demande si on n’est pas en train d’inventer ce besoin, si ce n’est pas juste un passage à vide, un cap à traverser. Et pourtant, malgré les tentatives de se raisonner ou de se distraire, la sensation revient. Ce n’est pas une envie de nouveauté, c’est plus profond : une nécessité, presque physique, de se réajuster. Mais sans carte, sans repères, ce besoin peut devenir angoissant. On oscille alors entre immobilité anxieuse et agitation vide.
Un exemple : Marion, 45 ans, et la sensation de tourner en rond
Marion est en couple, mère de deux adolescents, et travaille depuis quinze ans dans la même entreprise. Rien ne va mal, mais rien ne va bien non plus. Elle décrit une sensation diffuse de stagnation, comme si sa vie avait cessé de lui appartenir. Chaque matin, elle se sent plus lourde, plus distante de ce qu’elle fait. Elle dit : “je sens que je dois changer quelque chose, mais je ne sais pas quoi ni par où commencer.” En thérapie, ce flou devient une matière à explorer : elle découvre peu à peu qu’elle a construit toute sa vie autour de l’idée de stabilité, pour échapper au chaos de son enfance. Aujourd’hui, ce modèle protecteur devient étouffant. Elle n’a pas encore les réponses, mais elle commence à sentir ce qu’elle ne veut plus. Et ce premier mouvement, fragile, devient déjà un socle à partir duquel elle peut se penser autrement.
Quand la thérapie accompagne ce qui n’a pas encore de nom
Dans ces périodes de trouble intérieur, la thérapie peut devenir un espace rare : un lieu où ce qui n’est pas encore clair peut exister malgré tout. Ce n’est pas un endroit pour trouver des solutions immédiates, mais pour accueillir le mouvement qui commence. Elle offre un cadre dans lequel on peut entendre ce qui cherche à émerger, sans devoir le forcer ni le figer. Ce qui paraît flou, incertain ou dérangeant devient un signal, un point de départ. La transformation ne commence pas toujours par une décision, mais par un frémissement. Le travail thérapeutique permet de le suivre avec attention, de l’étoffer, de le laisser grandir jusqu’à ce qu’un sens se dessine. Et souvent, c’est précisément dans cet espace où l’on ne sait pas encore, que quelque chose d’essentiel commence à naître.