Psychologie

Pourquoi répétons-nous certains schémas, restons-nous parfois dans une situation qui nous fait souffrir, ou avons-nous du mal à faire un choix qui pourtant nous ressemble ? En psychogénéalogie, on parle souvent de loyautés familiales invisibles pour désigner ces attachements inconscients aux figures de notre lignée. Être loyal, ce n’est pas toujours une décision consciente : c’est parfois rejouer une histoire, porter un poids, rester fidèle à un ancêtre oublié. Ces loyautés peuvent nourrir, protéger… ou enfermer.

Une fidélité silencieuse mais puissante

La loyauté familiale se manifeste souvent sans que l’on s’en rende compte. Elle se tisse dans les gestes, les croyances, les non-dits. Un enfant peut, par amour, adopter les souffrances, les valeurs ou les limites d’un parent, même si cela freine son propre développement. Cette fidélité affective agit comme un pacte invisible : « Je ne réussirai pas mieux que toi », « Je ne vivrai pas ce que tu n’as pas pu vivre », « Je resterai dans l’ombre pour que tu ne te sentes pas seul(e) ».

Les formes que prennent les loyautés

Il existe des loyautés visibles – assumer une entreprise familiale, reprendre un métier ancestral – mais surtout des loyautés silencieuses. Elles peuvent se traduire par des choix de vie qui semblent incohérents, des blocages persistants, des auto-sabotages répétés, ou un sentiment de culpabilité à être heureux. Il y a aussi des loyautés croisées : se montrer triste pour ne pas abandonner un parent endeuillé, ou rester en difficulté pour ne pas rompre avec une souffrance familiale collective.

La loyauté envers les exclus, les oubliés

La loyauté ne se joue pas seulement envers les vivants. Elle agit aussi envers ceux dont on ne parle pas, les exclus de la famille, les oubliés de l’arbre généalogique. Un membre écarté, un enfant mort-né, un ancêtre honteux peuvent devenir des figures silencieuses mais agissantes. Quelqu’un, plus tard, portera leur mémoire en rejouant leur destin, en tombant à leur âge, en portant leur douleur comme pour les faire exister à nouveau. Ces loyautés sont souvent des tentatives de réparation inconscientes.

Une entrave à l’individuation

Lorsque la loyauté devient trop forte, elle peut entraver le processus d’individuation, c’est-à-dire le chemin qui mène à soi. On peut avoir du mal à se différencier, à faire un choix personnel sans se sentir coupable. Cette loyauté est d’autant plus agissante qu’elle est non dite, transmise par imprégnation émotionnelle, non par discours. On ne nous a pas dit d’échouer, mais on nous a montré qu’être heureux pouvait blesser quelqu’un. Ce type de loyauté agit en profondeur, au-delà de toute logique consciente.

Se libérer sans trahir

Sortir d’une loyauté familiale ne signifie pas renier ses origines, mais mettre de la conscience sur ce que l’on porte, et choisir ce que l’on transmet. Il est possible d’honorer son histoire tout en vivant une trajectoire singulière. Ce travail passe par la reconnaissance des liens, des dettes symboliques, des empêchements vécus, pour s’en libérer avec respect. Être loyal autrement, c’est ne plus porter pour les autres, mais transmettre ce qui est vivant, juste, possible.

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