Psychologie

Face à l’angoisse, la première tentation est souvent de chercher à comprendre. On interroge les causes, on remonte les événements récents, on cherche à expliquer. Pourtant, chez de nombreuses personnes souffrant de troubles anxieux, les explications rationnelles ne suffisent pas à apaiser l’état intérieur. On sait que l’avion ne va pas tomber, que le cœur bat normalement, que l’on n’est pas en danger — mais cela ne calme rien. Ce décalage entre la raison et l’émotion signe souvent une implication plus profonde du psychisme : ce n’est pas une peur logique qui s’exprime, mais une angoisse archaïque, liée à des zones inconscientes, que le discours ne suffit pas à atteindre.

La limite du discours logique

Dans l’anxiété, il est fréquent que la personne se sente envahie malgré elle, sans pouvoir « se raisonner ». Et pour cause : ce qui est en jeu n’appartient pas au registre du raisonnable, mais à celui du symbolique. Une phrase, une image, un son peuvent venir raviver une scène intérieure oubliée, sans que le sujet ait accès à ce lien. L’intensité de l’émotion dépasse alors la logique, car elle n’a pas sa source dans le présent, mais dans une mémoire affective qui s’est figée. Les mots ne suffisent pas à dénouer ce qui n’a jamais pu être mis en mots.

Exemple : Coralie, 35 ans, face à une peur sans cause

Coralie fait des crises d’angoisse dans les transports en commun. Elle sait qu’elle n’est pas en danger, mais son corps réagit comme s’il allait mourir. En séance, elle découvre que les moments de grande proximité physique réveillent un sentiment d’intrusion qu’elle n’a jamais pu nommer. Adolescente, elle a vécu dans une maison surpeuplée où elle n’avait aucun espace à elle. L’anxiété dans le métro n’est donc pas irrationnelle : elle est le retour différé d’un vécu insupportable. Ce n’est pas la foule qu’elle craint, mais l’impossibilité d’exister dans la promiscuité.

Quand le savoir devient un piège

Les patients les plus intellectuellement armés peuvent souffrir d’autant plus de leurs symptômes. Ils savent que leur peur est infondée, ce qui ajoute une culpabilité ou une honte supplémentaire. Le savoir n’apaise pas toujours, il peut même renforcer le clivage entre le sujet rationnel et le sujet souffrant. L’angoisse, alors, devient l’indice d’un reste psychique qui n’a pas encore été symbolisé. La résistance au discours est aussi une résistance à un refoulement plus ancien, qu’aucun raisonnement ne peut déloger.

Apprendre à entendre autrement

Ce n’est pas en expliquant mieux que l’on souffre moins. C’est en acceptant que l’émotion ait sa propre logique, étrangère à celle du langage courant. En accompagnant Coralie, le thérapeute ne l’a pas rassurée sur le métro, mais lui a permis de faire le lien avec son passé. Ce déplacement de sens transforme l’expérience anxieuse : elle devient une mémoire à déchiffrer, plutôt qu’un dysfonctionnement à corriger. C’est en faisant une place à l’illogique, à l’incongru, au non-dit, que l’apaisement peut émerger, lentement, mais durablement.

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