Pourquoi certaines rencontres fortuites nous bouleversent

Des effets de transfert puissants dans des contextes informels.

Il arrive que l’on croise une personne, que l’on échange quelques mots, parfois un regard à peine appuyé, et que cela suffise à nous troubler profondément. On ne comprend pas toujours ce qui s’est joué, mais on sent que “quelque chose” a eu lieu. Ce genre de rencontre, souvent brève et informelle, active en nous des mécanismes inconscients puissants, bien au-delà de ce que la situation semble justifier.

Un cadre propice à la projection

Les soirées, les dîners entre ami·es, les contextes festifs sont des espaces déstructurés, plus ouverts, où les rôles sociaux sont momentanément suspendus. Ce relâchement crée un terrain propice à la réactivation de désirs, de manques ou de représentations anciennes. On ne voit pas l’autre tel qu’il ou elle est, mais tel·le qu’il ou elle entre en résonance avec quelque chose de nous.

Le transfert en acte

Ce que l’on appelle transfert en psychanalyse, c’est ce déplacement d’affect vers une personne présente, qui vient raviver une figure absente du passé. La personne rencontrée devient le support d’une histoire plus ancienne, d’un attachement, d’une blessure, ou d’un idéal. Et c’est cette confusion entre présent et passé qui rend la rencontre bouleversante.

Un autre qui réveille, sans même le vouloir

Il ou elle n’a rien fait de particulier. Et pourtant, un mot, un ton, une posture corporelle, une manière d’écouter ou de rire suffit à faire remonter une émotion intense. L’autre ne sait rien de ce qu’il ou elle active ; mais ce qu’il ou elle incarne réveille un souvenir affectif enfoui. Il ne s’agit pas de lui, mais de ce qu’il ou elle évoque à notre insu.

Une faille ouverte sur l’intime

Dans ce type de rencontre, la perturbation émotionnelle est souvent disproportionnée par rapport à l’interaction réelle. Cela peut générer de la confusion, voire un sentiment de honte. Mais cette faille est aussi une occasion de découvrir quelque chose de soi que l’on ne savait pas encore. L’autre nous déplace ; il ou elle nous touche là où nous étions encore inconnu·es à nous-mêmes.

Écouter ce que la rencontre révèle

Il ne s’agit pas forcément de chercher à revoir cette personne, ni d’imaginer une suite. Mais de prêter attention à ce que cette brève rencontre a soulevé ; à ce qu’elle raconte de notre désir, de notre histoire, ou de notre besoin de lien. Car parfois, ce qui bouleverse ne vient pas de l’extérieur, mais de ce que l’autre a éclairé, sans le vouloir, à l’intérieur.