Psychologie

Certaines personnes ne peuvent fonctionner sans un emploi du temps strictement balisé. Listes, plannings, rétroplannings, rappels : tout est anticipé, structuré, ordonné. Cette organisation, souvent admirée de l’extérieur, répond en réalité à un besoin interne bien plus profond. Planifier à l’excès n’est pas toujours un signe d’efficacité, mais parfois une tentative inconsciente de contenir l’angoisse de débordement intérieur. Ce n’est pas le temps qu’il faut maîtriser, mais un soi vécu comme potentiellement instable.

Le temps comme rempart psychique

Face à une impression de chaos interne, la structuration temporelle agit comme un barrage. Elle permet d’ancrer la pensée dans du concret, de préempter l’imprévu, de neutraliser l’angoisse. Le temps balisé devient un contenant symbolique, qui remplace une fonction interne parfois défaillante : celle de la régulation affective. Ce n’est pas seulement le quotidien qu’on organise, mais une scène intérieure qu’on tente de stabiliser. Toute rupture dans l’organisation fait alors l’effet d’une brèche, d’un danger diffus mais réel.

La surorganisation comme défense contre l’effondrement

L’obsession de planifier ne concerne pas uniquement les actions futures, mais aussi les émotions qu’elles contiennent en germe. Chaque rendez-vous, chaque tâche fixée à l’avance devient une manière de prédire, donc de rassurer. Ce n’est pas la perte de temps qui est crainte, mais la perte de repères, la sensation de ne plus savoir où l’on est psychiquement. Dans ce contexte, l’agenda devient un objet transitionnel : ce qui relie, apaise, cadre. Une absence de planification est alors vécue non comme un moment libre, mais comme une désorganisation profonde du moi.

L’exemple de Laëtitia : planifier pour se contenir

Laëtitia, 36 ans, planifie ses journées à la demi-heure près. Même ses loisirs sont organisés à l’avance. Elle dit que cela lui « évite de se sentir dépassée », mais reconnaît aussi qu’elle panique lorsqu’un imprévu survient. En séance, elle évoque une enfance marquée par l’instabilité émotionnelle d’un parent, l’imprévisibilité des humeurs familiales. Ce qu’elle cherche dans la planification, ce n’est pas de l’optimisation : c’est un apaisement. Structurer le temps devient pour elle un moyen de contenir une angoisse plus ancienne, jamais formulée mais toujours active.

Trouver une sécurité plus intérieure

Il ne s’agit pas de rejeter l’organisation, mais de la remettre à sa juste place. Quand le besoin de tout anticiper devient tyrannique, il vaut la peine d’interroger ce qu’il protège. Accepter un peu de flottement, c’est tester sa capacité à s’ajuster sans se dissoudre. C’est faire l’expérience qu’il existe en soi des ressources autres que le contrôle. Car si planifier rassure, ce n’est pas toujours un gage de solidité : c’est parfois le signe d’un équilibre fragile, qu’un travail sur le rapport au temps peut venir peu à peu apaiser.

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