Psychologie

Certains jeux vidéo racontent une perte, une disparition, une séparation. Ils évoquent la mort d’un proche, la fin d’un monde, le passage d’un âge. Et pourtant, malgré leur tonalité mélancolique, ils nous apaisent. Ils nous touchent, nous font pleurer parfois, mais sans nous effondrer. Cette étrange consolation par la tristesse n’est pas un paradoxe : c’est un travail. Car dans ces jeux, quelque chose s’élabore en silence, à travers l’expérience vécue de l’immersion.

La tristesse comme espace symbolique

Ces jeux tristes ne cherchent pas à choquer. Ils enveloppent. Ils offrent un rythme lent, une musique fragile, des dialogues discrets. La tristesse y est contenue, non brutale. Elle est partagée avec douceur, ce qui en fait un matériau psychique traitable. Le joueur ou la joueuse n’est pas abandonné à l’émotion, il ou elle est guidé·e, accompagné·e. Cette forme narrative particulière recrée un espace symbolique de deuil, qui échappe à la brutalité du réel mais permet néanmoins de ressentir.

La perte vécue par procuration

Dans ces récits, ce n’est pas notre histoire qui est racontée, et pourtant elle résonne. Le jeu permet une identification souple, un déplacement affectif. On pleure pour l’autre, mais un peu pour soi. C’est cette distance juste qui rend la douleur supportable. L’écran devient un filtre protecteur, un espace tiers où le deuil peut se rejouer sans ravager. Le jeu ne panse pas directement nos blessures, mais il les effleure avec tact, en leur donnant une forme, un cadre, une narration.

L’exemple de Claire, 38 ans

Claire a joué à un jeu narratif centré sur la perte d’un enfant. Elle savait qu’elle serait touchée, mais ne s’attendait pas à cette forme de calme étrange après l’avoir terminé. Elle dit que “ça l’a aidée à penser à son propre deuil, sans y être totalement plongée.” Trois ans plus tôt, Claire avait perdu son père. Elle n’avait jamais réussi à pleurer vraiment. Le jeu, à travers une histoire différente, lui a permis de ressentir ce qui était resté bloqué. Elle n’a pas confondu les récits, mais l’un a permis d’approcher l’autre.

Une élaboration psychique médiée par la fiction

Ce que ces jeux offrent, ce n’est pas une catharsis violente, mais un tissage. Ils relient l’émotion au récit, la perte à un paysage, la douleur à une action douce. L’immersion permet une traversée symbolique, là où la réalité brute sidère ou fige. En jouant, on ne nie pas la tristesse : on lui donne un mouvement. Et ce mouvement, même discret, suffit parfois à remettre quelque chose en circulation dans le psychisme. C’est cela qui fait du bien : sentir que l’on peut, à nouveau, ressentir sans être détruit.

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