Psychologie

Perdre n’est jamais plaisant. Mais dans certains cas, la défaite ne se vit pas simplement comme un échec de stratégie ou une erreur collective. Elle prend une couleur plus intime, plus brutale. Pour certains joueurs, perdre en coopération touche à l’estime de soi, ravive une faille narcissique plus profonde. Le jeu cesse alors d’être un terrain de plaisir partagé pour devenir le théâtre d’une blessure personnelle, là où il était censé rapprocher.

Se sentir atteint au-delà du jeu

Dans une dynamique coopérative, la perte est supposée être partagée, intégrée, analysée ensemble. Mais pour celui ou celle dont l’ego est fragilisé, la défaite devient un miroir violent d’insuffisance personnelle. Même si l’échec est collectif, il est intériorisé comme un reflet de son incompétence ou de sa valeur défaillante. Le jeu touche alors à un point sensible : celui du sentiment de ne jamais être à la hauteur, même entouré.

Le collectif comme amplificateur d’une faille

Être en équipe peut soulager certaines tensions, mais aussi en raviver d’autres. La présence des autres rend la défaite visible, presque humiliante, même si personne ne juge. On s’identifie à sa performance, on projette sur les coéquipiers une attente de reconnaissance. Perdre devient une désorganisation de soi, non pas à cause du résultat, mais parce que la blessure narcissique était déjà là, en attente d’un contexte pour se réveiller.

L’exemple d’Adrien, 35 ans

Adrien joue à un jeu d’action coopératif avec des amis proches. À chaque défaite, il devient irritable, silencieux ou accusateur. Il dit que “ça lui gâche la soirée” et qu’il se sent “nul même quand ce n’est pas sa faute”. Dans sa vie, Adrien a souvent eu le sentiment de devoir prouver sa valeur, notamment auprès d’un père exigeant et peu expressif. Le jeu cristallise cette pression : l’équipe devient un jury silencieux, la défaite une condamnation personnelle. Il ne supporte pas de ne pas briller, même dans le cadre ludique.

Une exigence de réparation déguisée

Quand perdre devient insupportable, il est rare que cela ne parle que du jeu. Il y a là une tentative de réparation narcissique qui échoue à chaque faux pas. Le joueur n’essaie pas seulement de gagner : il essaie de guérir une image interne abîmée, de restaurer un sentiment de compétence qui lui a longtemps manqué. Le jeu devient alors un champ de bataille contre soi-même, et non un lieu de lien. Reconnaître cette souffrance derrière l’intolérance à la défaite permettrait d’ouvrir un espace de compréhension plutôt que de tension.

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