Psychologie

On parle souvent de la recherche d’emploi en termes de stratégie, de compétence ou de persévérance. Mais derrière ces dimensions visibles se joue une réalité plus intime. Chaque candidature est une exposition de soi, chaque silence un rappel possible d’une blessure plus ancienne. Être en recherche d’emploi, c’est souvent se confronter à une question silencieuse mais centrale : suis-je digne d’être choisi ? Cette période vient activer le narcissisme dans sa dimension la plus fragile, là où le désir de reconnaissance se heurte à la possibilité d’un rejet répété.

Postuler, c’est s’exposer

Envoyer un CV, rédiger une lettre de motivation, se présenter en entretien : tous ces gestes sont des mises en jeu du moi. Le sujet s’offre au regard de l’autre, espère une validation qui ne dépend pas de lui. Cette asymétrie rend la démarche hautement sensible. Pour certains, chaque refus réveille un sentiment d’insuffisance. Non pas parce qu’ils pensent réellement être incapables, mais parce que ce rejet fait écho à un vécu plus ancien : celui de ne pas avoir été choisi, préféré, regardé. Ainsi, ce n’est pas seulement une réponse négative qu’ils reçoivent, mais la réactivation d’un doute profond sur leur valeur.

Un exemple : Damien et la répétition du non

Damien, 38 ans, a quitté son entreprise après une rupture conventionnelle. Depuis, il multiplie les candidatures sans succès. Chaque absence de retour le touche plus qu’il ne l’admet : il ressent une forme de honte, d’effacement. En séance, il évoque un père distant, peu démonstratif, et une enfance marquée par l’effort constant pour mériter une attention jamais vraiment obtenue. Aujourd’hui, chaque offre d’emploi devient un théâtre discret de cette même attente : être enfin reconnu. Ce n’est pas tant le poste qu’il espère que le soulagement d’un regard posé sur lui, validant. La recherche d’emploi devient alors le lieu d’une répétition affective douloureuse.

Une attente saturée d’enjeux inconscients

Ce qui rend cette période si éprouvante, c’est la densité affective que le sujet y projette. Chaque retour, chaque silence est surinvesti, chargé d’un sens qui dépasse de loin la réalité objective de la situation. Il ne s’agit plus simplement de trouver un poste, mais de réparer une faille. Ce glissement rend la démarche plus vulnérable, car l’enjeu n’est plus seulement professionnel, mais identitaire. Le danger, alors, est de vivre chaque refus comme une confirmation d’un défaut d’être, et non comme un aléa du marché du travail.

Revenir à une juste mesure de soi

Traverser cette épreuve suppose un recentrage. Il ne s’agit pas de se blinder contre les refus, mais de retrouver une distance symbolique : ce que l’on est ne se résume pas à ce qui est retenu ou non. Se rappeler que la valeur personnelle ne dépend pas du choix d’un recruteur permet de désaturer le processus. La reconnaissance professionnelle peut être légitime à espérer, mais elle ne doit pas devenir la seule scène où se joue l’estime de soi. Retrouver cette séparation entre le désir d’être choisi et le besoin d’être aimé est souvent le début d’un soulagement.

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