Psychologie

Le désir de changer de voie professionnelle par le biais d’une formation s’exprime souvent dans les mêmes termes : besoin de sens, envie d’alignement, recherche d’épanouissement. Ces formulations résonnent justes, mais elles peuvent aussi masquer une tension plus difficile à nommer. Derrière certains projets de reconversion se cache moins une volonté d’avancer que celle d’échapper à un inconfort intérieur. Le besoin de rupture ne signifie pas toujours une aspiration à se trouver, mais parfois une tentative de se fuir autrement.

L’intolérance croissante à ce que l’on vit

Il arrive un moment où le métier que l’on exerce ne soutient plus l’image de soi. Ce n’est pas nécessairement un échec, mais une sensation insidieuse de décalage. Ce malaise, lorsqu’il s’installe, peut devenir le moteur d’un changement qui se présente comme une évidence, mais qui est souvent précipité. Ce n’est pas tant la projection vers une autre vie qui est porteuse, que la saturation de celle qu’on mène. On veut partir sans savoir exactement où aller. Le problème n’est plus situé dans une fonction, mais dans une perception intime de soi-même que le contexte professionnel vient cristalliser.

La formation comme zone tampon

Dans ces moments de flottement, la formation apparaît comme une transition légitime. Elle permet de ne pas rester immobile tout en différant le saut dans l’inconnu. Mais elle peut aussi devenir un refuge, un espace tampon où l’on met en suspens les vrais choix à faire. L’impression de mouvement suffit à calmer l’angoisse. On apprend, on se projette, mais sans s’interroger sur les désirs véritables qui sous-tendent cette démarche. La reconversion devient alors un déplacement latéral de la question de soi, et non son approfondissement.

L’exemple d’Élise : changer pour ne pas ressentir

Élise, 39 ans, salariée dans la communication depuis quinze ans, s’inscrit dans une formation de sophrologue. Elle dit vouloir “faire du bien autour d’elle”, “se recentrer sur l’humain”. Mais elle avoue aussi avoir du mal à se projeter dans ce nouveau métier, et se sent rapidement découragée. En séance, elle parle peu de ses aspirations mais beaucoup de son désintérêt croissant pour son ancienne fonction. Elle se sent “vidée” mais ne parvient pas à nommer un désir clair. Ce qu’elle fuit, peut-être, ce n’est pas un métier, mais une fatigue plus ancienne, liée à une exigence de réussite jamais interrogée. La formation devient un écran, un détour.

Reconnaître la fuite pour qu’elle devienne passage

Il ne s’agit pas de remettre en cause toutes les reconversions. Mais certaines naissent d’une fuite déguisée, d’un évitement plus que d’un choix. Lorsque le mouvement vers un nouveau métier ne s’accompagne d’aucun travail d’élucidation intérieure, il risque de rejouer les mêmes insatisfactions ailleurs. Le changement devient alors répétition, plutôt que réparation. C’est en acceptant de rencontrer ce que l’on tente d’éviter – vide, perte, conflit interne – que la formation peut réellement devenir un tremplin vers un soi plus juste.

Trouver un psy