Psychologie

Il n’est pas toujours évident de se détendre quand d’autres regardent. Dans les lieux de soins collectifs comme les spas, les piscines ou les hammams, le corps est exposé, les gestes sont visibles, et l’intimité devient partagée. Pour beaucoup, ces moments censés être apaisants réveillent un tiraillement silencieux : comment prendre soin de soi sans se sentir observé, jugé, ou déplacé ? Le soin devient alors une expérience intérieure autant qu’une confrontation au regard de l’autre.

Le malaise de se montrer en train de se relâcher

Recevoir un soin corporel ou s’immerger dans un bassin devant d’autres n’est pas neutre. Se montrer dans un moment de détente, c’est dévoiler une facette peu contrôlée de soi. C’est laisser voir une respiration plus lente, un visage apaisé, un corps non tendu. Pour certains, cette exposition douce devient une gêne. Non pas par honte de leur corps, mais parce qu’ils n’ont pas appris à se montrer dans la vulnérabilité paisible. Le soin, même silencieux, devient un geste intime mis en scène.

L’exemple de Julien, retenue et dignité

Julien, 41 ans, enseignant, accepte une journée dans un centre thermal avec des amis. Il hésite longtemps à faire le soin du hammam et du massage. Il redoute de “se relâcher devant les autres”, de perdre une forme de contenance. Finalement, il s’accorde le moment, à condition de rester discret. À sa grande surprise, il ne se sent pas jugé, mais soulagé. Il comprend que sa propre exigence de maîtrise n’était qu’un reflet intérieur, pas une attente extérieure. Il dit ensuite : « J’ai réalisé que prendre soin de moi ne faisait pas de moi quelqu’un de faible. »

Ce que le regard extérieur réveille

Être vu en train de recevoir un soin, c’est être vu dans un moment de non-productivité. Cela peut réveiller des croyances anciennes : “je dois mériter le repos”, “je n’ai pas le droit de ralentir tant que d’autres souffrent”. Ce regard, bien souvent imaginé plus que réel, reflète surtout notre propre difficulté à nous reconnaître comme dignes de soin. S’exposer au bien-être, c’est parfois plus difficile que de montrer ses blessures. Cela suppose de s’autoriser à être visible autrement : pas dans l’effort, mais dans l’accueil.

Une réconciliation avec son droit à exister

Oser prendre soin de soi en public, c’est parfois faire un pas vers une forme de réconciliation. Non pas avec son image, mais avec sa propre valeur. Ce n’est pas un étalage de bien-être, mais un geste silencieux d’estime personnelle. Dans les lieux de soins collectifs, chacun est là pour se déposer un moment. Et accepter d’en faire partie, malgré la pudeur ou la gêne, c’est déjà affirmer une chose essentielle : le droit d’exister sans justification, même dans la douceur.

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