Psychologie

La gestion du stress s’est imposée comme un impératif contemporain. À coups de respiration, de pleine conscience, d’hygiène de vie ou d’organisation méthodique, chacun tente de maintenir l’équilibre dans un quotidien souvent fragmenté. Mais derrière cette quête légitime d’apaisement, il arrive qu’un autre moteur se dissimule : non pas le désir de mieux vivre, mais la peur panique de s’effondrer. Et si, au fond, certaines stratégies anti-stress cherchaient moins à apaiser qu’à museler une angoisse plus archaïque et plus diffuse, que le stress ne ferait que révéler ?

Le calme comme refuge défensif

Pour beaucoup, le besoin de calme devient un objectif prioritaire. Tout ce qui dérange l’ordre intérieur est traité comme une menace à neutraliser : imprévus, discussions vives, exigences émotionnelles. Derrière cette recherche constante de sérénité, se cache parfois une intolérance profonde à l’agitation psychique, issue d’un terrain anxieux ou d’une histoire marquée par le débordement affectif. Le calme n’est alors plus un besoin mais un refuge rigide, où tout trouble est vécu comme un danger imminent.

L’angoisse primitive sous le stress visible

Le stress est un phénomène mesurable, situable, déclenché par des pressions identifiables. L’angoisse, elle, est plus sourde, plus insaisissable, souvent sans objet précis. Pourtant, de nombreuses personnes confondent les deux, et croient lutter contre le stress alors qu’elles cherchent à fuir cette angoisse souterraine, bien plus difficile à nommer. Ainsi, une surcharge professionnelle peut servir de point de fixation commode, alors que l’effroi vient d’un sentiment d’abandon ancien ou d’un vide intérieur difficilement tolérable.

L’illusion du contrôle total

Techniques de gestion du temps, méditation, routine du matin, planification minutieuse : tous ces outils peuvent être précieux, mais ils deviennent problématiques lorsqu’ils ne visent plus qu’à contrôler chaque recoin du monde intérieur. L’exigence de performance émotionnelle — ne jamais craquer, rester aligné, ne pas “redescendre” — peut mener à une tension paradoxale. L’obsession de la régulation crée alors… un nouveau stress, où le moindre débordement est vécu comme un échec personnel.

Un exemple : Sophie, entre maîtrise et panique

Sophie, 43 ans, a découvert la méditation après un burn-out. Au départ, cela l’a beaucoup aidée. Mais très vite, une sorte de rigueur invisible s’est installée. Si elle ratait une séance, elle se sentait coupable, agitée, menacée de perdre pied. Au fil du temps, elle s’est aperçue qu’elle utilisait ces outils non pour mieux vivre, mais pour éviter de penser à la peur qui la rongeait dès que le silence devenait trop profond : celle d’être seule, de ne pas exister en dehors de son rôle professionnel. En apaisant trop bien son stress, elle avait coupé l’accès à une vérité plus intime.

Apprendre à tolérer le trouble

Gérer son stress, oui — mais pas au prix d’un évitement radical de l’angoisse. Car ce trouble qui affleure parfois est aussi un signal, une invitation à comprendre ce qui, en soi, reste encore inconsolé. Plutôt que de chercher à le faire taire, il est parfois plus fécond de lui laisser une place, dans un cadre sécurisé, pour en entendre le message. L’apaisement véritable ne vient pas seulement du silence, mais de la rencontre avec soi dans ce qu’on a de plus mouvant, de plus incertain, de plus vivant.

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