Psychologie

Certaines personnes ne parviennent jamais à faire une vraie pause. Même en vacances, elles planifient, organisent, remplissent. Leur temps semble en tension permanente, chaque silence devient suspect, chaque moment vide appelle une tâche. Ce fonctionnement, souvent valorisé socialement, peut cacher une fragilité plus profonde : un rapport angoissé au vide intérieur. Le mouvement constant protège d’un face-à-face avec soi que le sujet ne peut pas encore habiter.

L’arrêt comme lieu menaçant

S’arrêter suppose de ne rien faire, de ne rien produire, de ne pas se justifier. Pour certains, cette absence d’activité est intolérable, presque violente. Non pas parce qu’ils ont toujours envie de faire, mais parce que ne rien faire les expose. À des pensées qu’ils préfèrent éviter, à des émotions enfouies, à une perception d’eux-mêmes difficile à soutenir. Le vide n’est pas neutre : il devient le lieu d’un affolement psychique.

L’hyperactivité comme couverture

Être toujours en mouvement, toujours utile, toujours engagé peut fonctionner comme un mécanisme de défense. L’agenda plein rassure. Il fait écran. Il empêche l’émergence de ce qui, dans le silence, pourrait remonter. Culpabilité, tristesse, colère ou angoisse. Le sujet confond repos et passivité, silence et abandon, vide et désorganisation. Il préfère la fatigue à l’effondrement qu’il imagine venir s’il relâche le contrôle.

L’exemple de Sophie, 43 ans

Sophie a une vie bien remplie : travail, engagements associatifs, enfants, sport. Elle se plaint d’être épuisée, mais ne supporte pas de ne rien faire. Dès qu’un moment se libère, elle le comble. En thérapie, elle réalise qu’enfant, elle n’avait pas le droit de se “laisser aller” : l’oisiveté était vécue comme une faute. Sa famille associait la pause à la faiblesse, à l’échec. Ce modèle l’habite encore. Le refus de s’arrêter est devenu une loyauté invisible, mais coûteuse.

Le vide comme épreuve symbolique

Ce qui rend la pause insupportable, ce n’est pas son absence d’activité. C’est ce qu’elle risque de faire entendre. Dans l’arrêt, quelque chose peut se dire qui ne trouve pas de place ailleurs. Une plainte non formulée, un désir mis de côté, une douleur jamais reconnue. La pause ouvre un espace non balisé, non balisé par les impératifs habituels. Et pour certains, cet espace est trop vaste, trop flottant, trop chargé.

Apprivoiser le rien

Il ne s’agit pas d’opposer repos et activité, mais de retrouver une liberté de rythme, qui ne soit plus dictée par la peur ou la loyauté. Une pause peut être brève, discrète, presque imperceptible. Mais elle doit être vécue comme autorisée. Pour cela, le sujet doit pouvoir déposer quelque chose de l’urgence intérieure. Ce n’est qu’en étant entendu dans ce qu’il redoute du vide qu’il peut commencer à le traverser autrement.

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