Psychologie

Il arrive qu’un trouble persiste malgré les traitements, les soins, les efforts. La douleur reste là, les rechutes se répètent, les améliorations sont de courte durée. Ce qui s’installe n’est pas seulement un problème médical, mais une forme d’attachement inconscient au symptôme, souvent difficile à reconnaître. Et si, derrière l’impossibilité de guérir, se cachait une fonction psychique protectrice, voire une structure identitaire ?

Le symptôme comme point d’ancrage

Certaines douleurs chroniques ne se maintiennent pas par hasard. Elles ont fini par structurer un rapport au monde, une place dans l’environnement, une manière d’exister. Perdre le symptôme serait alors perdre une part de soi, ou perdre ce qu’il permettait de justifier, de contenir, de différer. Il devient le garant d’un équilibre fragile : rester malade, ce n’est pas vouloir souffrir, mais parfois éviter de faire face à une autre souffrance, plus archaïque, plus insupportable encore.

L’exemple de Romain, 34 ans, douleur persistante au genou

Romain consulte depuis trois ans pour une douleur au genou apparue sans cause traumatique nette. Il a tout essayé : kinésithérapie, infiltration, repos, sport adapté. Mais la douleur persiste, étrangement plus présente quand des décisions importantes l’attendent. En thérapie, il commence à faire un lien : son symptôme lui évite de devoir s’affirmer professionnellement, ou d’oser une reconversion qui le terrifie. Le genou douloureux devient l’excuse parfaite, inconsciente, pour rester dans une position connue. Le symptôme n’est pas une punition : c’est une stratégie.

Guérir, un acte de séparation

Amorcer une guérison profonde suppose parfois de renoncer à la protection que le symptôme assurait. Cela peut générer une peur intense, car ce renoncement touche à l’identité même. Qui suis-je sans cette fatigue, cette douleur, cette plainte ? Quelle place vais-je occuper si je ne me définis plus par ce qui m’entrave ? Le corps conserve ce que l’esprit n’a pas encore décidé de quitter. Ce n’est pas de la mauvaise volonté : c’est une fidélité invisible.

Une loyauté silencieuse envers le passé

Certains symptômes sont liés à des fidélités anciennes : à un parent souffrant, à un passé marqué par la perte ou l’effondrement. Rester empêché devient un moyen d’être fidèle à une histoire. Guérir, dans ce cas, serait trahir. Le corps maintient alors la douleur comme un lien affectif invisible. Il protège l’individu d’une rupture qu’il ne pourrait symboliser. La guérison ne peut advenir qu’à condition d’honorer autrement ce passé.

Entendre ce que la douleur retient

Plutôt que de forcer la disparition d’un symptôme, il peut être plus fécond de l’écouter. Que permet-il d’éviter ? Que soutient-il ? Que retient-il ? C’est en reconnaissant la fonction protectrice du symptôme que l’on peut en défaire progressivement la nécessité. Ce n’est qu’alors que le corps pourra envisager de relâcher son emprise, non comme une perte, mais comme une transformation.

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