Psychologie

Certains intérieurs débordent. Objets sur les étagères, meubles rapprochés, bibelots accumulés, murs saturés. Rien ne manque, tout déborde. Pour l’observateur extérieur, cela peut sembler oppressant ou désordonné. Mais pour la personne qui y vit, cet excès n’est pas un hasard. L’accumulation traduit souvent une tentative de combler une absence, de donner corps à une présence que rien d’autre ne vient incarner. Le trop-plein matériel ne parle pas seulement d’un goût ou d’un style : il raconte une lutte contre un vide plus profond, plus silencieux.

Les objets comme remparts contre une vacance intérieure

L’espace habité devient, dans ces cas-là, une extension du psychisme. Chaque objet remplit une fonction symbolique : il occupe, il rassure, il évite. Le vide visuel devient insupportable car il évoque un autre vide, moins visible mais plus menaçant : celui du manque affectif, du silence ancien, du désinvestissement intérieur. On entoure alors son existence de couches matérielles pour ne pas avoir à faire face à l’absence. Le plein, ici, n’est pas une richesse, mais un écran. Il étouffe autant qu’il protège.

Exemple concret : ne plus pouvoir jeter sans angoisse

Myriam, 45 ans, vit dans un appartement très rempli. Elle conserve des objets depuis l’adolescence : livres, vêtements, souvenirs, petits cadeaux. Tout a une place, tout a une histoire. Elle dit : « Je sais que c’est trop, mais je ne peux pas me résoudre à jeter. J’ai l’impression de perdre une part de moi. » En séance, elle comprend que ces objets ont souvent représenté une forme de continuité dans des moments de rupture affective. Ce n’est pas l’objet en soi qu’elle craint de perdre, mais le lien symbolique qu’il soutenait. Le vide lui paraît menaçant car il renvoie à des pertes qu’elle n’a jamais pu élaborer.

La peur du vide comme symptôme d’un désinvestissement ancien

Derrière l’impossibilité de faire de la place se loge souvent une peur de l’effondrement. Le vide spatial réactive une peur du vide psychique : si je retire quelque chose, tout risque de s’écrouler. Il ne s’agit pas de possession, mais de maintien. L’objet devient un repère, un appui fragile contre une angoisse de dissolution. L’habitat trop rempli reflète alors une absence d’espace intérieur disponible pour se poser, se délier, s’écouter. L’extérieur vient saturer ce que l’intérieur ne parvient pas à habiter.

Vers un allègement possible, non menaçant

Faire de la place suppose un travail de séparation symbolique. Il ne s’agit pas de jeter pour épurer, mais de renoncer sans s’effondrer. Myriam, en commençant par un seul objet, découvre qu’elle peut laisser partir sans se trahir. Peu à peu, l’espace devient plus respirable, et l’angoisse diminue. Elle découvre que le vide n’est pas forcément un signe d’abandon, mais parfois un appel à l’ouverture. Ce déplacement permet de reconfigurer son rapport à l’environnement : moins comme un refuge saturé que comme un lieu de présence habitée.

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